💠 Le biais algorithmique est le meilleur ennemi de la FinTech

Avr 3, 2018 | Parutions

par Aurélie Jean, PhD, scientifique numéricienne, entrepreneure

Le 10 Avril 2018, Ă  Station F, France Fintech rassemblera les principaux acteurs de la Fintech : rĂ©gulateurs, entrepreneurs, investisseurs. C’est l’occasion unique d’écouter et d’échanger avec celles et ceux qui seront partie prenante de la rĂ©volution qui touche l’industrie financiĂšre depuis 5 ans.

La FinTech est aujourd’hui Digitalo-Analytique

L’industrie financiĂšre Française a construit sa rĂ©putation rayonnante sur ses quants. Aujourd’hui le numĂ©rique est la voie pour innover en finance de marchĂ© et en assurance. L’exemple rĂ©cent de Goldman Sachs qui a fait un changement radical dans son industrie en devenant d’une certaine maniĂšre une entreprise Tech, montre cette tendance. Le data scientist et le dĂ©veloppeur informatique deviennent des gold commodities pour cette industrie qui se rĂ©invente. Des outils numĂ©riques sont dĂ©veloppĂ©s pour analyser les marchĂ©s, pour dĂ©tecter les fraudes et dĂ©lits d’initiĂ©s, pour faire des prĂ©dictions sur les stocks, ou encore pour identifier des portefeuilles d’investissement. En assurance, on utilise des outils numĂ©riques capables d’estimer le coĂ»t d’une couverture Ă  partir du profile de l’assurĂ©, ou encore des outils numĂ©riques capables de simuler le risque d’attribution d’un prĂȘt. Ces outils puissants et a priori plus justes, peuvent malheureusement crĂ©er des discriminations s’ils sont mal dĂ©veloppĂ©s et utilisĂ©s. Ces discriminations impliquent une considĂ©ration diffĂ©rente des individus Ă  partir de stĂ©rĂ©otypes et prĂ©jugĂ©s, qu’on nomme aussi biais. En plus des considĂ©rations sociĂ©tales et humaines Ă©videntes, les biais algorithmiques sont le risque pour les entreprises de la FinTech d’écarter certaines populations des leurs segments de clients. Ces biais interviennent dans les critĂšres de l’algorithme, ainsi que dans la data choisie pour calibrer l’algorithme ou le modĂšle. Dans le contexte du machine learning les consĂ©quences de ces biais sont amplifiĂ©es car la data possiblement biaisĂ©e va entraĂźner l’algorithme et engendrer Ă  l’issue de l’entrainement des critĂšres a posteriori fortement biaisĂ©s et souvent difficilement rĂ©versibles. Les acteurs de l’industrie financiĂšre doivent comprendre les mĂ©canismes de ces technologies et de l’intelligence artificielle, pour devenir des utilisateurs Ă©clairĂ©s.

Les Biais Algorithmiques sont une opportunité pour la FinTech de se réinventer

En machine learning les algorithmes sont entraĂźnĂ©s sur des donnĂ©es choisies par les Hommes. Dans le cas de l’estimation du prix d’une assurance, si on entraĂźne les algorithmes uniquement sur des donnĂ©es des assurĂ©s des derniĂšres dĂ©cennies, on reproduira inĂ©vitablement les biais de genre, d’origines sociales et d’origines ethniques du passĂ©. C’est ainsi qu’aux États-Unis un assurĂ© noir paye jusqu’à trois fois plus son assurance voiture qu’un assurĂ© blanc. Des techniques actuelles doivent ĂȘtre utilisĂ©es avec prudence, comme par exemple les techniques utilisĂ©es par la sociĂ©tĂ© FICO (FICO credit scores) qui capturent des informations sur leur clients via leur cellulaires pour dĂ©finir leur credit score. Un autre exemple est la compagnie Allemande Kreditech qui demande Ă  ses clients de partager avec elle leurs rĂ©seaux sociaux afin de caractĂ©riser le profile des individus appartenant Ă  leurs cercles d’amis. Selon Kreditech, avoir des amis qui ont de bons credit scores est un bon indicateur de votre capacitĂ© Ă  gĂ©rer un crĂ©dit et donc de le rembourser. Ces approches enferment les algorithmes de prise de dĂ©cision dans certains de nos prĂ©jugĂ©s et de nos stĂ©rĂ©otypes. Un autre exemple est le news & social media sentiment index dĂ©veloppĂ© par Bloomberg. Cet index est calculĂ© entre autres Ă  partir de l’analyse des postes sur les rĂ©seaux sociaux tels que Twitter pour dĂ©finir un sentiment vis Ă  vis d’une entreprise prĂ©sente sur le marchĂ© public. Il est intĂ©ressant d’aller chercher dans cet index un levier pour dĂ©cider ou confirmer une stratĂ©gie d’investissement dans un stock. La tendance gĂ©nĂ©rale est de dire que lorsque des tweets ont un sentiment nĂ©gatif sur une entreprise prĂ©sente sur le marchĂ©, cette derniĂšre risque surement de voir la valeur de son action diminuĂ©e. NĂ©anmoins cette tendance ne peut pas devenir une rĂšgle explicite, il faut rester prudent car on sait Ă©galement que certaines entreprises dĂ©fient cette logique comme l’entreprise Apple. Ces exemples montrent la complexitĂ© de mettre en place des rĂšgles explicites gĂ©nĂ©rales pour automatiser des dĂ©cisions et faire des prĂ©dictions. Ces limitations et ces possibles biais imposent aux acteurs de la finance et de l’assurance d’ĂȘtre plus crĂ©atifs et mĂȘme d’investir dans des Ă©quipes de recherche, comme l’a fait Capital One. L’industrie financiĂšre a Ă©tĂ© fortement impactĂ©e Ă  la suite de la crise de 2008, et de nombreux acteurs de cette industrie affirment que l’ensemble des rĂ©gulations votĂ©es et mises en place Ă  la suite de la crise a profondĂ©ment limitĂ© la crĂ©ativitĂ© du secteur. La transformation digitalo-analytique et l’intelligence artificielle offrent une opportunitĂ© unique aux entreprises de la FinTech de se rĂ©inventer et d’innover Ă  nouveau, en dĂ©veloppant des outils numĂ©riques ambitieux et encore plus intelligents pour approcher notre sociĂ©tĂ© et notre Ă©conomie de façon plus juste et plus transparente. Les acteurs de l’industrie FinTech vont se transformer, et cette mutation passera par une meilleure connaissance et une meilleure maĂźtrise des technologies.

Les acteurs de la FinTech deviennent des utilisateurs éclairés de la Tech

L’utilisation Ă©clairĂ©e des outils numĂ©riques de prise de dĂ©cision, d’analyse et de prĂ©diction, devient critique dans tous les domaines, et l’industrie financiĂšre n’y Ă©chappe pas. Sans devenir des experts techniques, les acteurs de la FinTech doivent comprendre les mĂ©canismes technologiques ainsi que les processus d’automatisation et de prĂ©diction. L’industrie financiĂšre devient encore plus en profondeur Tech, et les acteurs traditionnellement orientĂ©s business et finance doivent se transformer. Ces acteurs doivent Ă©galement comprendre cet Ă©cosystĂšme pour mieux anticiper les innovations, les risques et les futurs changements possibles de leur mĂ©tier respectif. L’apprentissage du code informatique par un cas d’usage de leur mĂ©tier, est un moyen efficace pour comprendre les notions, les challenges et les enjeux concernant les algorithmes, la data, les biais, la performance, le machine learning, les API ou encore la cyber sĂ©curitĂ©. Cet acculturation leur permet Ă©galement de comprendre les actions et rĂ©gulations actuellement dĂ©battues ou mises en place, et par consĂ©quent de mieux s’y prĂ©parer. En Europe le rĂšglement gĂ©nĂ©ral sur la protection des donnĂ©es (RGPD) en action Ă  partir du mois de Mai 2018 s’articule autour de trois grands points: le profiling, la transparence et, les biais et les discriminations. Le Equal Credit Opportunity Act aux États-Unis exige un traitement Ă©gal des individus sans considĂ©ration d’origine ethnique, de langue, de religion, ou encore d’orientation sexuelle. La FinTech innove dans un nouveau paradigme qui s’inscrit dans une dimension responsable et dans une transparence financiĂšre et analytique, et le biais algorithmique est son meilleur ennemi !

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Cet article fait partie d’une sĂ©rie de billets publiĂ©s dans le cadre de l’Ă©vĂšnement annuel organisĂ© par France Fintech : Fintech R:Evolution 2018, qui aura lieu le 10 Avril à Station F à Paris, sur le thĂšme “Data Liberation”. A partager, commenter et liker sur LinkedIn avec le hashtag #FFT18.

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